Cathovoice a reçu en juin Olivier Bonnassies, auteur avec Michel-Yves Bolloré du livre Dieu – La science – Les preuves. Le succès de ce livre paru en octobre 2021 et vendu à plus de 200 000 exemplaires semble avoir remis le sujet sur la table : on ne compte plus le nombre d’articles et de conférences qui ont eu lieu depuis sur ce thème, signe d’ailleurs que cet ouvrage ne fait pas toujours consensus, notamment chez les catholiques eux-mêmes. Plusieurs livres ont ainsi été publiés dans la foulée reprochant entre autres à ce livre la confusion des genres (La science, l’épreuve de Dieu de François Euvé avec la participation d’Etienne Klein, ou encore Dieu n’a pas besoin de preuves de Jacques Arnould).
Il semblerait tout d’abord qu’un certain nombre de catholiques, et même la société tout entière, aient été comme « traumatisés » par le XIXe siècle et ses découvertes scientifiques qui semblaient relayer la foi au domaine de l’obscurantisme, comme si foi et science se situaient sur un même axe et que l’avancée de l’une faisait reculer l’autre. Il en a découlé une première idée, encore bien courante dans les mentalités contemporaines, qu’être religieux est faire preuve de bien peu de raison, ce à quoi l’Eglise et les Papes n’ont cessé de répondre (Encyclique Fides et Ratio de Jean-Paul II notamment). Il en a découlé une deuxième idée, fort courante chez les chrétiens eux-mêmes, que foi et science étaient deux domaines qui évoluaient parallèlement sans avoir jamais rien à se dire, histoire de ne pas se faire avoir deux fois par ce même piège des siècles passés !
La réalité est sans doute encore différente, et le livre Dieu – la science – les preuves est à cet égard très intéressant. Le « malaise » éventuel autour de ce livre vient peut-être du mot « preuves », qui semble nous priver de notre liberté. C’est là qu’il convient déjà de faire peut-être une différence entre preuves absolues et preuves relatives. Il convient ensuite de voir ce que le catéchisme de l’Eglise catholique nous enseigne lui-même à ce sujet. Deux paragraphes sont à retenir :
– Dans le paragraphe « Les voies d’accès à la connaissance de Dieu », il est dit : « Créé à l’image de Dieu, appelé à connaître et à aimer Dieu, l’homme qui cherche Dieu découvre certaines « voies » pour accéder à la connaissance de Dieu. On les appelle aussi « preuves de l’existence de Dieu », non pas dans le sens des preuves que cherchent les sciences naturelles, mais dans le sens « arguments convergents et convaincants » qui permettent d’atteindre à de vraies certitudes. »
– Dans le paragraphe « La connaissance de Dieu selon l’Eglise », il est dit : « La Sainte Église, notre mère, tient et enseigne que Dieu, principe et fin de toutes choses, peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine à partir des choses créées. »
Il serait ainsi plus judicieux de modéliser la foi et la science/raison comme deux courbes de la forme y=1/x et y=-1/x, distinctes donc mais convergentes vers un même point x=0 à l’infini sur l’axe des ordonnées (qui représenterait le temps)… Et ainsi plus les sciences avancent, plus elles nous donnent de « preuves » de l’existence de Dieu, sans jamais pour autant arriver à mettre un point final à ce questionnement. « Un peu de science éloigne de Dieu, beaucoup en rapproche. » C’est ce que veut montrer ce livre, dans lequel, à défaut d’être nécessairement convaincu par toute la démarche et tous les arguments, on apprend énormément de choses sur les dernières découvertes scientifiques.
Et le point final n’est en effet pas donné, car une fois qu’on a constaté un certain nombre de preuves en faveur d’un « Créateur » à l’origine du monde, on n’a finalement pas dit grand-chose… Qui est ce Dieu ? Quel rapport avec les différentes religions ou spiritualités existantes dans le monde ? S’intéresse-t-il à l’être humain ? S’intéresse-t-il à moi en particulier ? Qu’est-ce que son existence change pour mon quotidien ? Autant de questions auxquelles un ou même deux livres ne sauraient simplement répondre, or ce sont finalement peut-être celles qui travaillent le plus nos contemporains. La personne humaine reste ainsi entièrement libre tel que Dieu l’a voulu. En espérant que ce livre puisse faire tomber quelques barrières dans les esprits pour les ouvrir à une authentique rencontre avec le Christ, qui est finalement le point de départ de toute vie chrétienne.